mercredi 16 septembre 2020

Le Mazdéisme et l'Astrologie

 

ZOROASTRE LE ROI DES ASTRES

 

« La plus belle définition de la divinité qui se trouve parmi les Anciens, est celle de Zoroastre. »

                                                                  Saint Eusèbe de Césarée

                           



Connu des Grecs comme l’inventeur de l’astrologie et le maître de Pythagore, Zoroastre, le prophète aryen, est l’une des figures sacrées les plus respectées et adulées de toute l’Antiquité. Né d’après les Grecs, à peu près 5000 ans avant la guerre de Troie, Zoroastre est le fondateur de la religion zoroastrienne. 

En dehors de ses Ghata, (hymnes philosophiques et religieuses), Zoroastre n’a pas vraiment inventé une nouvelle religion, il a seulement rénové l’ancienne religion des Mages. A ce titre, il est plus un grand réformateur qu’un prédicateur chevronné. Zoroastre le Spitamid (de la famille de Spitama), à ne pas confondre avec Zoroastre le roi de Bactriane et le supposé maître de Pythagore, qui est né à l’époque de Vishtâspa (2300 av-JC), huitième roi de la dynastie des Kayanides. Il reprit les éléments fondamentaux du culte du feu hérité de ses ancêtres et des Mages, mais réprima les sacrifices sanglants et le culte rendu aux divinités mineures.

 


Au Moyen Âge Zoroastre est tantôt glorifié comme l’une des plus grandes lumières du monde, tantôt comme l’ancêtre des astrologues ou le père de la magie ! L’étymologie du nom de Zoroastre a également fait l’objet de nombreuses spéculations et théories. Les Grecs traduisaient Zoroastre par « l’astre d’or ». Selon Julius Oppert (né le 9 juillet 1825 à Hambourg), le fameux assyriologue allemand, Zoroastre signifie « splendeur d’or ». Anquetil Duperron l’un des plus grands orientalistes français du XVIIIe siècle, a identifié dans le nom de Zoroastre (Zaratoushtra), zeré (d’or, doré) et thaschtré (du tištrya, le nom de l’étoile Sirius). Ainsi selon Anquetil  Duperron, Zoroastre signifierait: « l’Astre d’Or ». L’association du nom de Zoroastre avec Sirius est très significative, étant donné qu’en dehors de Mars, Sirius est l’astre le plus vénéré de tout le Panthéon des Corps célestes chez les Perses. Dans le livre saint des zoroastriens, le Zend Avesta, un hymne de plusieurs pages appelé Tištar Yasht, est même spécifiquement dédié à Sirius. Appelé le général du ciel ou le général qui commande aux étoiles, Tištriya, étymologiquement, tri-str-iya « composé de trois étoiles », fait partie des divinités-patrons de la seconde septaine des Yazata-Gaithya, c’est-à-dire des divinités astrales visibles, ayant un corps céleste.  

 

Buste de l'Archi-Mage Kertir

Si les anciens Grecs voyaient en Zoroastre l’inventeur de l’astrologie ou le père de la magie, c’est parce que la religion de Zoroastre, le Mazdéisme, est essentiellement une religion astrologique, basée sur le culte des astres et le mouvement des corps célestes. Cette affirmation déplait à une certaine catégorie de zoroastriens dits « laïques » (comme si on pourrait être à la fois adepte du mazdéisme et laïc !), qui tentent de ne voir en Zoroastre qu’un grand philosophe cartésien dépourvu de toute formation métaphysique ! Vouloir réduire l’un des plus grands Archi-Mages de l’histoire au rang d’un simple philosophe, est un sacrilège impardonnable qui témoigne de l’étroitesse de l’esprit de ces pseudos intellectuels de comptoir [extrait de l’Astrologie Persane ; tome 2].


Pendentif en Or représentant Vénus
époque Achéménide

 

De nombreux auteurs grecs de l’antiquité ont rédigé des livres sur les anciens Perses, les Mages et leurs religions et rites sacrés, comme Héraclide de Kymè (4ème siècle av-JC), Charon de Lampsaque (5ème siècle av-JC, auteur de Persika), Hécatée de Milet, ou encore Dionysos de Milet, sans oublier bien-sûr Xanthos le Lydien auteur du Magika (5ème siècle av-JC).   


Darius

 

On apprend alors ici ou là que la divinité suprême des Perses est Zeus, ou encore Ahura-Mazdâ, ce qui correspond simplement à Jupiter. Vient ensuite Mithra le dieu de la lumière céleste, le dieu des pactes (alliances) et du jugement céleste, mais aussi le dieu de la guerre. Le binaire rejoint le ternaire avec Aredvi-Sura-Anahita (l’Immaculée déesse des Eaux, ou le fleuve puissant qui engendre la pureté), Déesse extrêmement vénérée, crainte et respectée à la fois par la caste des Rois et des nobles, des Mages, des Guerriers, mais aussi par diverses souches de la population comme la caste des paysans et des agriculteurs.

 

Anahit à Droite tenant l'anneau du pouvoir 
et de la royauté ...

Aredvi-Sura-Anahita est la Déesse qui préside à l’eau, aux rivières, aux fleuves, à la fécondité, elle est digne des plus hautes vénérations, car elle détruit les démons, guérie les afflictions, éloigne la souffrance, accorde courage et vitalité, augmente la vie et les troupeaux, accorde bénédictions et exauce les vœux … !  Anahit préside à Vénus, son équivalent romain est Aphrodite (son équivalent chez les Grecs est Anaïtis ou Artémis), plusieurs temples ont étaient érigés à son effigie aux alentours de 500 av-JC, à Suse, en Hyrcanie et à Babel etc. 


Représentation d'Anahita, époque 
Sassanide. Plat liturgique en argent 

 

Après la chute de l’empire Achéménide, ce fut Sassân fils de Babek fils de Dara, grand mage du sacerdoce d’Anahid, qui en héros unificateur de l’empire, rétablit la royauté et fonda la dynastie des Sassanide vers 224 ap-JC. Toutefois les origines du culte de la déesse remontent à plus de 4000 ans av-JC (ex : la déesse Narundi, ou Nanhunte et Nahiti chez les Élamites).    

         


Ishtar / Astarte 

 

Le cinquième Yašt de la sainte Avesta est attribué à Aredvi-Sura-Anahita :

 

Puisses-tu offrir le sacrifice à Aredvi-sura-Anahita qui s’étend au loin, la guérisseuse, l’ennemie des dévas (les démons), fidèle à l’enseignement d’Ahura, digne d’être vénérée par le monde matériel, digne d’être priée par le monde matériel,

L’ašavanī qui accroît les cours d’eau

L’ašavanī qui accroît les troupeaux

L’ašavanī qui accroît les vivants,

L’ašavanī qui accroît les fortunes,

L’ašavanī qui accroît les peuples,

Elle qui rend efficace la semence de tous les mâles,

Qui rend fécondes le ventre de toutes les femelles …     

 

Les Sacrifices dédiés à la déesse s’effectuaient au bord des fleuves ou des rivières, notamment au bord du fleuve Jaxartes (ou Sīdaryā en persan) en Asie-Central (le fleuve tire sa source depuis la mer d’Aral). Les Mages creusaient soigneusement une fausse au bord du fleuve, le sang des sacrifices était mélangé avec du lait et du Haoma la plante de l’immortalité (éphédra), et versé dans la fausse. Pas une goutte du sang ne devrait en revanche souiller l’eau sacrée du fleuve. Du vin et d’autres libations ont était offert à la déesse. 




Un bouc blanc portant une couronne de laurier et quelques tiges de grenadier était alors sacrifié par les Mages, on passait l’animal à travers la fumée de l’encens, un mélange de cannelle, des pétales de roses, de la myrrhe et des graines de pavot. Parfois 7 colombes blanches étaient également offertes à la Déesse.

Anahita représente Vénus, les offrandes et les sacrifices à la déesse devraient donc avoir lieu au bord des fleuves sacrés de Vanghvi Daitya (ونگوهی دایتیا) en Géorgie, ainsi que celui du Jaxartes (Syr-Daria : fleuve d’Asie Centrale qui trouve sa source dans les montagnes sacrées du Kirghizstan jusqu’à la mer d’Aral).




Nous ne connaissons pas exactement sous quelle configuration astrologique les sacrifices avaient lieu, mais nous savons de source certaine que Vénus devait être en mouvement direct, ne recevant pas d’aspect des planètes maléfiques, qu’il devait être conjoint à Jupiter, ou en aspect à Jupiter, qu’il devait être situé en Balance, à 27° ou à 15°, ou à 27° des Poissons, ou à 14° ou 15° ou 21° ou 27° du Taureau.          


Temple d'Anahit à Kangavar époque
achéménide 


Temple d'Anahit à Kangavar 

Temple d'Anahit Kangavar


De nombreux temples on était érigés un peu partout dans l’Empire perse pour célébrer le culte d’Aredvi-Sura-Anahita. A Suse (époque Achéménide), où l’effigie de la déesse était en or massif pure, à Bishapour dans le grand temple du feu de Shayz, et aussi à Kangavar (époque Achéménide également). Les effigies de la déesse étaient souvent couvertes d’or et de pierres précieuses (notamment d’émeraudes et de perles. La déesse était représentée debout, parfois ailées, gisant à ses pieds 1 ou 2 lions, l’effigie de la déesse était souvent couverte de peaux de tigre femelle.



Le zend Avesta d’écrit la déesse comme une jeune demoiselle d’une beauté éblouissante, ayant un corps parfaitement proportionné, portant des boucles d'oreilles carrées et une ceinture lumineuse aux hanches, noble de ligné, portant des bottines scintillantes hautes jusqu’aux mollets …


Deuxième Partie :




Du culte de la Déesse

Clément d’Alexandrie l’historien chrétien du 1er siècle de de notre ère, en se référant à Bérose (Berosus Caldaeus, astrologue et mystagogue et prêtre de Marduk, 350 av-JC) mentionne que ce fut Xerxès II, fils d’Artaxerxés (380 av-JC) qui en suivant l’exemple de son père, popularisa le culte de la déesse Aredvi-Sura-Anahita à travers tout l’empire. Il fit construire des temples à l’honneur de la déesse à Babylon, à Suse, à Ecbatana (ancienne capitale des Mèdes), à Sardes et à Bactres et érigea de nombreuses effigies de la déesse.


Temple d'Anahid à Bishabour 


Les découvertes archéologiques attestes que des temples d’Anahid ont bien existaient avant même l’ère Achéménide, notamment à l’époque de l’empire Mède et des rois Mèdes comme à l’époque du roi mage Kyaxares.    

Ishtar / à ses pieds les chèvres sauvages


Les temples d’Anahid étaient richement décorés et contenaient souvent des trésors inestimables ! Pline décrit le temple d’Anahid à Suse, ainsi que l’effigie de la déesse en or massif  haut de 9 pieds et couvert de peaux de tigre. Le temple d’Anahid à Balkh (Bactres) abritait un statut de la déesse en albâtre portant une couronne en or massif ayant 8 pointes et 100 étoiles (en diamant, pierre de vénus). Les statues de la déesse étaient souvent recouvertes de peaux de tigre.    


Bol Astrologique avec Cassiopée  


La richesse légendaire des temples d’Anahid a parfois incité certains monarques intrépides et téméraires de s’attaquer à ses temples pour piller les trésors gardés.
  Ce fut par exemple le cas de Mark Antoine (Marcus Antonius). Aux alentours des 36 av-JC étant informé que les légions Parthes étaient occupait dans une campagne à l’Est (vers l’Euphrate), il attaqua l’empire Parthe. La raison officielle des Romains était la défaite de Crassus dans la bataille Carrhae. Antoine réussit à piller le somptueux temple d’Anahid à Suse avant que les légions parthes puissent riposter, et emmena dans sa retraite la statue de la déesse en or massif. 

Jugando


Il est reporté que tous ceux qui ont souillé les temples d’Anahid ont étaient emportés par une mort violente (ce qui est le cas de Mark Antoine, mais aussi d’Antiochos III qui pilla le temple d’Anahid à Elimais et qui mourut peu de temps après victime de la colère des fidèles).     

Les temples d’Anahid étaient équipés d’un autel du feu, et d’un bassin sacré où d’une cour d’eau. On sait d’après plusieurs sources (notamment Plutarque) que des prêtresses vierges (sorte de Vestales) officiaient dans les temples d’Anahid. Ses derniers étaient hautement craints et respectés et devaient rester vierges jusqu’à la fin de leur vie.

Old Persia 


On célébrait la fête de la déesse au mois d’Abān au jour d’Abān, c’est-à-dire le 10ème jour du mois Abān qui correspond à peu près à 26 Octobre.

Les temples contenaient également des jardins luxuriants dans lesquels les prêtresses d’Aphrodite cultivaient des plantes médicinales. Selon les témoignages des lions et des tigres apprivoisés se promenaient en toute liberté. D’après les chroniqueurs du moyen-âge ses temples et l’activité recluse des prêtresses d’Anahid ont beaucoup inspiré la vie monastique de l’ère chrétienne. D’après Procopius de nombreux temples d’Anahid situés dans les territoires plus à l’Ouest furent plus tard transformés en église, ou détruits.       

De nombreuses fêtes religieuses étaient dédiées à Anahita dans le calendrier mazdéen, le plus connue avait lieu le 26 octobre (چهار آبان). En ce jour les gens se rendaient aux bords des rivières et offraient des prières et des offrandes à la déesse.   



Rhyton époque Achéménide


Le couronnement des Rois

En dehors des fonctions liturgiques, les temples d’Anahid étaient utilisés depuis la plus haute antiquité lors des couronnements des rois. Xerxès (Xšayāršā : seigneur des héros : 486-465 BC) après la mort de son père Darius, a été couronné a Pasargades dans un temple d’Anahid. Chapour 1er fondateur de la dynastie des Sassanides a été également couronné dans le temple d’Anahid à Shayz (sachant que son grand père Sāssān, était le grand prêtre d’Anahita à Istakhr), Ardashir 1er (224-241) a été couronné dans le temple d’Anahid à Istakhr (Naqsh-e Rostam) etc. Lors des cérémonies le roi bois du vin, ou parfois du lait caillé, dans un rhyton en argent à tête de bélier ou de Capra Aegagrus (chèvre sauvage), et mange sept figues sèches et des pistaches.    

Artaban IV 216-224 ap-JC


Aredvi-Sura-Anahita et les Temples de Vénus

Vénus, tout comme Ishtar ou Astarté, n’est pas uniquement la déesse de la beauté et de la fertilité, elle est également la déesse de la Guerre (Aphrodite ; déesse de la mort-dans-la-vie ! Androphonos : Tueuse d’hommes !) et de la mort !

Tous les héros fondateurs de l’Empire Perse depuis l’aube des temps ont offert d’innombrable sacrifies à la Déesse patronne de toutes les eaux, car Baga-banu-Anahita est la toute puissante, sa force est égale à toutes les eaux qui tel un torrent  rugissant descendent du sommet du mont Hukairya (la montagne sacrée au centre du monde derrière laquelle se lève et se couche les étoiles, la demeure de la déesse) et qui s’étendent en mille fleuves et mille mers !


Persepolis 


Ainsi les héros fondateurs ; Haošiangha, Yima Xšaeta, Azi-Dahāka, Trâetaona, Keresāspa, Frangrasyan le touranien, Kavi Usa, Kavi Husravah etc ont chacun en leur temps offert des milliers de sacrifices à la Déesse Anahita afin d’obtenir sa grâce et être victorieux sur les ennemis d’Airyana Vaeja (ایران ویج) et de pouvoir régner sur la Perse. Zoroastre lui-même en personne a rendu un grand sacrifice à la déesse au bord du fleuve sacré Dâityâ, afin qu’il puisse convertir le roi Kayanid Kavi Vištâspa à la bonne religion.

A travers les écrits de zend nous rentrons dans les arcanes sacré de la magie de l’eau, nous apprenons les mystères de l’élixir de la vie cachés dans les profondeurs des ondes, c’est pourquoi lorsqu’il n’y a pas de Roi digne du Fravahr (ou le Xwarenah, Xvarena ; l’Esprit-Saint, ou encore le Graal) celui-ci se retire et se cache dans les profondeurs de la mer Vouru-Kaša. Pour l’obtenir, les héros guerriers ou les guerriers mages, s’affrontent dans des batailles épiques, où seul un héros pur en pensée, en parole et en acte sera digne de l’emporter.

Ainsi les temples d’Anahid étaient également le sanctuaire des plus grands guerriers de l’Empire, les rois et les généraux Perses se recueillaient avant de participer à des grandes batailles. Les murs du temple étaient décorés avec les couronnes, les épées et parfois même la tête des rois vaincus !    

Temple du Feu et d'Anahid d'Azar Gushnasp